[C.3.] La Voix des Nôtres [1935-1939] (French)

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Déclarée en juillet 1935, la faillite d’Ersa n’a pas provoqué la disparition du catalogue socialiste, qui continue de s’enrichir de nouveaux disques portant pour nom non plus « Ersa », mais « La Voix des Nôtres ». En décembre 1936, Georges Delmas (dit Georges Isabelli) dépose au registre du commerce une enseigne sous ce nom, donnant probablement son existence officielle à une production discographique semblant s’opérer hors d’un cadre entrepreneurial dédié. Cette hypothèse est soutenue par la norme de catalogage choisie pour référencer les rééditions et les nouvelles sorties socialistes à partir de l’automne 1935. Alors que les disques Ersa portaient des références changeant pour chaque série, désignant le plus souvent des faces de disques, la nouvelle norme (à partir de DR501 pour les disques 25 cm., à partir de DR801 pour les disques 30 cm.) désigne un disque entier, et ce jusqu’en 1939. Le nouveau catalogue n’est par ailleurs plus structuré en série. Ces deux ruptures avec la méthode éditoriale d’Ersa suggèrent que la production des disques socialistes est alors confiée à de nouveaux concepteurs.

Dès 1935, le catalogue de « La Voix des Nôtres » réédite d’abord la quasi-intégralité du catalogue Ersa, en piochant parmi ses enregistrements pour assembler de nouveaux disques. Il continue ainsi la propagande-éducation sonore du début des années 1930, alors qu’une propagande basée sur l’émotion est pratiquée par la frange la plus à gauche de la SFIO en réponse à la montée du fascisme. Les productions nouvelles font la part belle à la musique, largement majoritaire. Le discours politique est aussi présent, notamment sous la forme d’ensemble de plusieurs disques reproduisant, pour la première fois au catalogue socialiste, l’intégralité de discours prononcés lors d’événements publics.

Au moment du Front populaire, disques de discours et de musique sont mis à profit pour soutenir l’exercice du pouvoir par la SFIO. On remarque notamment des disques relatifs au réseau des auberges de jeunesse, soutenant la politique culturelle du gouvernement. Des disques de musique catalane sont publiés pour participer à la publicisation en France du combat des républicains espagnols face au camp franquiste. Les disques de discours accompagnent également certains thèmes de la politique socialiste, comme la protection de l’enfance, ou mettent l’accent sur des spécificités du gouvernement – trois femmes y entrent et trois femmes sont enregistrées en 1936 par La Voix des Nôtres – ou des événements inattendus. L’un d’eux est le suicide du ministre de l’Intérieur Roger Salengro. Léon Blum prononce son éloge funèbre, enregistré avec les moyens du Centre d’enregistrement (Service de la Radiodiffusion) du Ministère des Postes Télégraphes et Téléphones, puis publié par La Voix des Nôtres.

Atteignant son pic en 1936, la production de l’entreprise stoppe en 1937 après la publication d’un ensemble de trois disques de discours de Paul Faure, puis reprend en 1938 avant de décroitre en 1939. Elle cesse complètement pendant l’Occupation. Les disques sortant après la guerre sont pour la plupart sans caractère politique explicite. Madeleine-Lorris, veuve de Jean-Lorris, fonde une nouvelle « Voix des Nôtres » en 1951.
(French)

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